En tant qu’adulte, il nous arrive d’associer spontanément la vie affective et amoureuse des jeunes au « grand amour » ou encore aux relations sexuelles. Cette tendance peut nous amener à négliger de parler de relations saines et égalitaires avec les enfants en pensant qu’il est trop tôt, ou encore à aborder le sujet uniquement sous l’angle de la sexualité avec les adolescents et les adolescentes.
Les expériences affectives et amoureuses des enfants peuvent être teintées d’inégalités en fonction des sexes. Le rôle des parents est primordial dans le développement de relations saines et égalitaires, et plusieurs gestes peuvent être posés pour les favoriser :
Selon un sondage mené auprès de 540 parents, 87 % se disent préoccupés par le fait que leur enfant vive des relations interpersonnelles saines et égalitaires (source : SOM, 2017).
Dès le primaire, les enfants peuvent expérimenter certains comportements intimes : se tenir la main, se tenir proche de l’autre ou éprouver des sentiments plus forts pour un ou une amie. Ces émotions suscitent chez eux des questions, même s’ils n’en parlent pas explicitement.
On doit veiller à ne pas projeter sur les enfants des attentes qui ne leur appartiennent pas. On évitera par exemple de poser des questions telles que: « Est-ce que c’est ton amoureux ou ton amoureuse? ». Mieux vaut laisser les jeunes apprécier par eux-mêmes les différents degrés d’intensité de leur affection, sans y accoler un statut social bien défini ou leur imposer une « pression sociale » voulant qu’il soit important, déjà à leur âge, d’être en « couple amoureux ». Comme c’est durant l’enfance que s’expérimente la capacité de séduire , il est essentiel de commencer à parler de consentement en utilisant des mots simples et adaptés à l’âge de l’enfant.
À propos d’un garçon qui dit avoir une blonde ou qui semble être « populaire » auprès de plusieurs jeunes filles, vous avez probablement déjà entendu la remarque « Tu es un vrai charmeur! ».
Une fille qui dit avoir un chum est plus susceptible d’entendre des commentaires la mettant en garde contre les garçons ou contre elle-même : on lui dira par exemple que « les garçons contrôlent moins bien leurs pulsions » ou de faire attention à ne pas se mettre à risque d’une agression sexuelle. On lui rappellera aussi les risques d’une grossesse ou des ITSS.
Ces réactions spontanées relaient des messages aux enfants. Autrement dit, la relation amoureuse est valorisée pour les garçons et synonyme de « danger » pour les filles. En voulant bien faire, il est possible que par leur attitude des adultes renforcent l’image de la femme « vulnérable » et de l’homme « prédateur ». Rien pour favoriser les relations saines et égalitaires!
En formulant des avertissements comme « ne t’habille pas trop sexy et ne bois pas trop pour ne pas te faire agresser », on peut involontairement véhiculer l’idée que la personne qui est victime d’une agression a une part de responsabilité. Il faut axer les messages sur l’importance du consentement et sur le fait que rien ne justifie une agression.
De nos jours, en « un seul clic », les enfants peuvent avoir accès à divers contenus à caractère sexuel qui ne respectent pas nécessairement leur niveau de développement psychosexuel.
Plusieurs banalisent l’accès qu’ont les jeunes à ces contenus en prétextant qu’« il faut être de son temps » et que « les jeunes d’aujourd’hui en savent beaucoup plus que ceux d’autrefois et que c’est tant mieux! ». Or, même si les enfants ont davantage accès à des contenus sexuels par le biais des TIC, cela ne fait pas d’eux des personnes aptes à composer avec ces réalités. Malgré l’évolution rapide des TIC et des réalités sociosexuelles qui en découlent, le développement psychosexuel des enfants, lui, est demeuré le même. Il revient donc aux adultes de s’assurer que les étapes de ce développement soient respectées.
Les premières relations amoureuses se vivent habituellement entre 12 et 16 ans. Comme elles peuvent être d’une forte intensité, il importe de se montrer sensible à ce que ressentent les jeunes et d’être conscient de l’importance que ces relations ont dans leur vie. Cette période est aussi l’occasion de les amener à se questionner sur les modèles de relations amoureuses qui leur sont proposés.
Selon l’INSPQ , un jeune sur vingt (6 %) a eu une première relation sexuelle avant l’âge de 14 ans : « cet âge peut être considéré précoce et être associé à une plus grande vulnérabilité à l’égard du risque de contracter une ITS ou de vivre une grossesse non planifiée. » À l’âge de 17 ans, 50 % des filles et 40 % des garçons ont déjà eu une première relation sexuelle. Contrairement à ce que l’on pourrait penser, ces proportions se maintiennent depuis 1980, et « les jeunes ne seraient donc pas plus précoces que les générations qui les ont précédés »!
Malgré le poids médiatique des réalités liées aux relations et aux technologies de l’information et de communication, les relations des préadolescents et des adolescents ont surtout lieu hors ligne . Il n’en reste pas moins que ce qui se passe en ligne affecte bel et bien la vie des jeunes et la vie scolaire, ce qui rend incontournable le fait de s’y intéresser.
Ainsi, plusieurs réalités plus ou moins récentes font de plus en plus la manchette. Le sextage (sexting), la cyberintimidation, la sextorsion et l’accès à des sites de rencontres et de cyberpornographie se sont « invités » dans le paysage de la sexualité adolescente et de son développement.
Des chercheurs ont observé que les garçons décrivent les filles qui envoient des sextos comme étant des « traînées » ou en « manque d’assurance », alors qu’ils perçoivent celles qui n’en envoient pas comme étant « prudes » ou « snobs ».
Le sextage positionne les filles dans une situation « perdantes-perdantes » où, peu importe qu’elles s’y adonnent ou non, elles seront jugées plus durement que les garçons – et donc victimes de sexisme.
D’abord, s’il est vrai que ne pas envoyer de sextos limite les risques, il ne faut pas seulement axer nos messages de prévention sur la recommandation « n’envoie pas de photo de toi », mais aussi lancer le message : « ne harcèle pas! ». On doit amener les jeunes à comprendre la gravité du geste que constitue le partage de l’image intime d’une autre personne sans son accord.
Enfin, plutôt que de leur faire porter le blâme d’un phénomène d’ordre social, il est plus avantageux de prendre le temps de questionner les jeunes sur leurs perceptions du phénomène de l’hypersexualisation et de susciter leur réflexion critique sur celui-ci. On peut aussi intervenir sur les facteurs de risque et de protection tels que l’estime de soi, l’affirmation de soi, l’image corporelle, la violence dans les relations amoureuses, etc.
Il n’est pas toujours facile de dire non. Souvent, les jeunes finissent par envoyer une image intime après avoir reçu de nombreuses demandes de la part de quelqu’un.
Des campagnes mettent en avant l’idée qu’il faut outiller le jeune pour qu’il soit capable de dire non plus facilement (par exemple : si on te demande une photo de toi, envoie plutôt une réponse humoristique, une image de remplacement , etc.).